L’annonce d’un mouvement de grève de la surveillance des examens a provoqué l’hostilité générale du gouvernement et des éditorialistes. Écoutons l’inénarrable Pascal Praud sermonnant l’enseignante Frédérique Rolet : « pour tout vous dire, on a du mal nous même à savoir ce que vous n’aimez pas dans cette réforme. Mais enfin, le jour du bac ! C’est un tabou le bac, c’est un des moments les plus importants de la vie d’un collégien… euh… d’un lycéen ». lien
M. Praud, arrêtez de jouer les andouilles ! La réforme portée par Jean-Michel Blanquer vise à faire disparaitre le bac national actuel, et à le remplacer par des évaluations continues locales – qui seront mises en place dès la rentrée 2019 pour les élèves de 1ère. Cette évaluation locale, avec des épreuves différentes selon les établissements, pénalisera les élèves des lycées défavorisés qui n’auront plus les mêmes chances dans leur orientation. Il s’agit donc bel et bien de la mort programmée du bac que vous prétendez défendre !
Ajoutons que cette réforme est mise en place dans la précipitation la plus totale, au détriment de nos élèves – par exemple, les futurs élèves de Terminale passeront en 2020 le dernier bac national, mais nul ne sait ce qu’ils feront s’ils le ratent, puisqu’il n’existera plus en 2021. A cela s’ajoute le remplacement des filières S-ES-L par des options au choix, qui s’est fait là encore sans aucune préparation. Rendez vous compte qu’une nouvelle matière, l’enseignement numérique, apparait en septembre avant même qu’ait été formé le personnel censé l’enseigner ! Et quant aux mathématiques, le nouveau programme unique de 1ère n’est tout bonnement pas réalisable avec les classes prévues, mélangeant des élèves destinés à tous types d’études et qui étaient jusque là dans des filières distinctes. Notre hiérarchie nous a confirmé avoir remonté les mêmes préoccupations, sans retour de la part de Jean-Michel Blanquer. On pourrait donner bien d’autres exemples, mais en résumé : en l’état cette réforme constitue une grande régression, et sa mise en oeuvre précipitée en Septembre serait une catastrophe pour les élèves.
Après avoir dit tout ça, pourquoi menaçons-nous de blocage ? Et bien, tout d’abord, pour que la société réalise l’importance du bac national et lui manifeste son attachement. Et ce premier objectif est d’ores et déjà atteint. Certes, nous entendons l’argument de ne pas pénaliser les élèves. Mais ce ne sera pas le cas : le ministère a parfaitement les moyens d’organiser des sessions de rattrapage pour les élèves empêchés de passer le bac. Et si Blanquer renonce à sa réforme suite à notre mouvement, nous serons évidemment ravis de faire passer ces épreuves !
C’est ce qu’il s’est produit après mai 1968, avec une épreuve spéciale organisée le 27 juin, et contrairement à une légende tenace le baccalauréat n’a pas été donné. Le taux de réussite s’est élevé à 80%, un taux comparable à aujourd’hui mais supérieur à celui de l’époque, ce qui a donné à plus d’élèves la chance d’aller à l’université. Ainsi, nous pouvons affirmer qu’aucun élève qui aurait eu son bac dans des conditions normales ne sera pénalisé par ce mouvement, le seul « risque » étant que plus d’élèves l’obtienne. L’argument de la « dévalorisation » de ce bac n’est pas non plus tenable, puisque de toute façon le bac est voué à disparaitre en 2021 et à être remplacé par des évaluations locales.
Mais surtout, si vous voulez que le bac se déroule normalement, la solution est très simple: que le gouvernement ajourne son projet de destruction du bac!