Les évolutions actuelles du Brexit, ou plus exactement du vol du Brexit décidé souverainement par le Royaume-Uni il y a deux ans, fournissent des enseignements incontournables pour tous les soutiens d’une sortie de la France de l’Union Européenne. Ces enseignements doivent être d’autant plus pris au sérieux que la France est également dans l’euro, ce qui rendra une sortie d’autant plus difficile – mais évidemment possible et souhaitable si on s’y prépare en amont.

1) La Grande-Bretagne paye pour la colonisation de l’Irlande du Nord

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La pierre d’achoppement des négociations entre le Royaume-Uni et l’UE porte en réalité sur un territoire colonisé, l’Irlande du Nord. En effet, face au soulèvement populaire, la Grande Bretagne avait dû conclure en 1998 un accord prévoyant notamment l’ouverture de la frontière avec le reste de l’île irlandaise. Du coup, elle se retrouve face à un dilemme: ou bien elle rétablit cette frontière et relance la résistance irlandaise, ou bien elle positionne la frontière au niveau de l’île britannique, ce qui reviendra de facto à reconnaître à terme l’indépendance et la réunification de l’Irlande. Autrement dit, la Grande Bretagne ne pourra retrouver sa souveraineté face à l’UE qu’à la condition qu’elle respecte à son tour la souveraineté irlandaise. On pourrait imaginer des scénarios similaires pour la France, avec des territoires sous domination ou influence française qui préféreraient retrouver leur indépendance plutôt que participer à une France hors-UE. Evidemment, il faudra leur accorder !

2) Oubliez l’article 50, c’est un attrape-nigauds!

Tout soutien du Frexit se souvient des exhortations de l’UPR à utiliser l’article 50 vaille que vaille, et à obéir aux traités tant que les deux années de négociations n’auront pas abouti. Autrement dit, deux années laissées à la partie adverse pour imposer ses conditions et chercher comment saboter le processus de sortie. Quelle folie ! Dès que la décision sera prise, il faudra immédiatement sortir de l’UE et de l’euro, tout en cherchant comment établir les meilleures relations bilatérales avec nos voisins. Il existe une bonne piste pour cela : réaffecter notre contribution nette annuelle au budget de l’UE (environ 7 milliards pour la France, et 3 milliards pour le Royaume-Uni en 2016) à la coopération bilatérale avec les pays bénéficiaires, au lieu de vouloir immédiatement la supprimer. Ne soyons pas radins : le jeu en vaut la chandelle, il s’agit d’établir de nouvelles relations diplomatiques basées sur la coopération et le respect, soit tout le contraire de la zone de libre-échange appelée « UE ».

3) le problème, c’est la circulation des marchandises et des capitaux, pas des personnes !

Mais alors, pourquoi le Royaume-Uni s’est-il engagé dans l’article 50 ? Une des raisons est qu’il craignait une attaque des marchés financiers en cas de sortie sans accord. C’est justement pour anticiper ce scénario qu’il faut se préparer à rétablir le contrôle des changes. De même, il est absurde de vouloir conserver le libre-échange avec les autres pays de l’UE alors même que c’est cette concurrence libre et non faussée qui exerce une pression insoutenable sur nos normes sociales et environnementales. L’erreur tragique qu’a commis Londres est de confondre la circulation du capital avec la circulation des personnes, et donc de se focaliser sur la question migratoire. Pourtant, une solution alternative au problème irlandais aurait pu être trouvée en rétablissant des frontières dématérialisées s’appliquant uniquement aux marchandises et aux capitaux, mais pas aux personnes. Mais cette solution, l’UE refuse d’en entendre parler, car elle mettrait fin au mythe de l’équivalence entre liberté de circulation et libre-échange. Un mythe qui a malheureusement la vie dure, et qui sert à l’UE pour se donner une image humaniste et pour discréditer ses opposants qui tombent dans ce panneau.