Mercredi 28 Novembre, un Gilet Jaune interpellait en direct la secrétaire d’Etat Emmanuelle Wargon afin qu’elle dévoile le montant de son indemnité. Il ne s’agissait pas là d’une question innocente: une des revendications des Gilets Jaunes est que l’ensemble du personnel politique soit payé au salaire médian, soit environ 1700 euros mensuels, afin qu’il soit directement impacté par les politiques qu’il met en oeuvre. Imaginons un monde où la classe politique serait obligée d’augmenter le SMIC et les salaires pour pouvoir elle-même s’enrichir!

salaire

Certes, le salaire du personnel politique est moins élevé que celui du grand patronat ou des éditorialistes, mais les personnes qui aspirent à nous représenter sont actuellement en dehors de tout contrôle: elles ne sont pas tenues de respecter leurs promesses de campagne, elles ne sont tenues par aucune limitation de mandats, elles ne rendent de compte à personne. Pire, leur rémunération est tellement élevée que beaucoup choisissent d’en faire une carrière, de « se servir » plutôt que de nous servir, et n’ont jamais travaillé en-dehors de la politique. Pourtant toute personne qui sollicite nos suffrages nous doit des comptes dans tous les sens du terme, elle doit se montrer exemplaire et transparente.

La revendication du salaire médian est particulièrement subversive car elle est applicable ici et maintenant pour toute figure politique prétendant soutenir les Gilets Jaunes! Ainsi, des député.e.s de tout bord politique affichent leur soutien, tout comme plusieurs candidat.e.s aux futures élections. Fort bien, mais êtes vous prêts dès à présent à vous rémunérer au salaire médian et à reverser le surplus à des associations? Cette demande n’a rien d’extravagant, puisqu’elle est déjà mise en oeuvre par le député François Ruffin, et elle constitue un excellent test pour évaluer la crédibilité des organisations affirmant soutenir les Gilets Jaunes: il suffit d’un geste pour prouver votre bonne foi!

Ce mouvement n’est donc pas seulement anti-Macron: il porte aussi et surtout une défiance salutaire envers tous les cadres actuels de représentation, et envers les forces d’opposition qui voudraient changer les personnes sans toucher aux institutions. Le système actuel n’est pas démocratique, car nous n’avons aucun moyen pour proposer des lois ou pour révoquer des élu.e.s ne respectant pas leur mandat. C’est d’ailleurs pour cette raison que l’instauration d’un référendum d’initiative populaire fait partie des revendications prioritaires.

Pour conclure, quelques mots sur le reste de ces revendications. Travail et logement pour tou.te.s, retraite à 60 ans, indexation des salaires sur l’inflation, renationalisation de l’énergie et des autoroutes, non-remboursement des intérêts de la dette, réouverture des petites lignes, des maternités, des bureaux de poste et des écoles… Ces propositions sont excellentes mais inapplicables dans le cadre de l’Union Européenne, car l’Etat français ne maîtrise ni sa monnaie, ni son budget, ni ses frontières commerciales. Cette question doit donc être abordée sans tabou.

Enfin, on reste perplexe devant certaines propositions sur l’immigration, ou sur la hausse du budget de la défense. Etant donné le climat actuel d’état d’urgence et de guerre intérieure, il importe de dire haut et fort que le racisme n’est pas une « question sociétale annexe » mais une stratégie de la classe dominante pour nous diviser. C’est ce message que s’attache notamment à porter le comité Justice pour Adama Traoré, assassiné par l’institution policière le jour de son anniversaire. Oui, l’insurrection en cours comporte ses parts d’ombre, mais elle est totalement légitime: comme le stipulait la Constitution de 1793: « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est (…) le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs ».